Dimanche, JP est mort. J’ai reçu un message de P au matin pour me l’annoncer. Plus tard, il se déplacera jusqu’à C pour venir chercher leur soeur Y. Je les retrouverai dans un troquet non loin de la gare. Je me surprends à une grande émotion, devant mon ordinateur et mon café, même si cette issue était attendue, voire souhaitée, afin que ses souffrances s’abrègent. Il y a de cela un peu plus d’un an, JP, le jour de son anniversaire, P et moi passions la soirée à P, au concert mythique de Nick Cave and the Bad Seeds. JP, sous traitement, avait éprouvé une grande difficulté à monter les gradins. Enthousiastes, nous étions ensuite allés dîner dans un restaurant aux abords de la salle. P était tendu, triste. Il avait compris. Mais ce ne fut pas la dernière fois que je rencontrai JP, mais à l’exposition de photos qu’il donna à S-D au mois de janvier. AC passait quelques jours à la maison. Une photo a immortalisé le concert, tous les trois levant notre coupe, devant un stand de marque de Champagne, il fallait bien se faire plaisir. Une autre photo a figé le dernier moment où j’ai vu JP, entouré de P, M, AC et moi. JP semble détaché et heureux. Il avait compris lui aussi. Il y eut ce rendez-vous manqué ensuite au salon de N en septembre. Trop diminué, il n’avait pas pu nous rejoindre. Je pensais à JP souvent depuis, lui envoyais en message de temps en temps. J’avais choisi la sobriété et l’humour, puisque la tradition se déclinait à l’ironie entre nous trois, à se moquer de la tradition aussi. J’admirais ce type, issu comme P des banlieues de N, ouvrier, vif, humain, curieux, sans oublier la grivoiserie potache, parfois un peu lourde qui accompagnait sa douceur. Nous avons beaucoup ri ensemble, à mes dépens, aux siens, à ceux de P, qu’il louait surtout en aparté de nombreuses qualités. JP avait saisi une forme de poésie au monde, de beauté, la pratiquait, interrogateur, dans sa photographie. Un peu de poésie, donc, quitte le monde avec lui. P m’a prévenu hier que la cérémonie aura lieu jeudi. J’irai. Etrangement, dans la soirée, je la rejoindrai Elle en visite à O.
Dimanche, sonné, je n’ai pas lu une ligne de la journée. Après la visite de P à C et un passage par la ferme horticole de P, qui organisait un petit marché de créateurs locaux, je suis reparti vide de tout, me suis abruti devant mon téléphone jusque tard dans la nuit, en me promettant d’arrêter, de suivre l’exemple poétique de JP. Mais on ne peut pas dire que je sois versé dans la poésie, ni aussi doué que lui dans le domaine. Hier, A et M sont revenus pour la semaine m’apporter un peu de chaleur, en plus de l’agitation. J’ai passé la journée à emballer des colis. Le week-end fut plutôt vendeur, et pourtant, cette période ne m’est pas commercialement profitable en général, juste cette fin du mois de novembre.
Ce matin, je me réveille entouré des deux amis chiens. J’ouvre la fenêtre pour les laisser filer au jardin, me retrouve devant mon ordinateur, mon café. Je pars en balade avec eux puis plonge dans le ventre de la maison. Encore des colis. Je reçois des messages touchants de LM, RM hier soir. A aussi m’avait envoyé son amitié. Je les retrouve plus tard dans l’après-midi à la librairie, pleins de prévenance pour moi. De retour, nous partons les chiens et moi pour un grand tour, portés par un air doux et sec. Je reviens à la saisie de bande-dessinées en soirée. Il ne subsiste que deux petites caisses par rapport aux trente initiales. Le cour du temps a déjà repris, donc.